Site : Les médaillés militaires de 1852 à 1870
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Le ou les résultat(s), s’il y en a un ou plusieurs, vous donnera pour chaque médaillé la date d’obtention de la médaille et la citation éventuelle le concernant. Conçu à partir des listes publiées par le Moniteur Universel de 1852 à 1870, enrichi des dossiers de Légion d’honneur et d’informations glanées dans les dépôts d’archives (Paris, archives nationales, Légion d’honneur).
À ce jour la base référence 58 495 décorés.
La médaille militaire
L’une des décorations les plus prestigieuses au monde, mais aussi des plus originales puisqu’elle récompense à la fois les soldats, gradés et sous-officiers et les généraux ayant commandé en chef devant l’ennemi.
Elle était surnommée à juste titre, sous le Second Empire, ” le Bijou de l’Armée “.
Historique
Par un coup d’état, dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851, Louis-Napoléon, Président de la IIe République, ouvre la voie à une restauration de l’Empire : l’Assemblée Nationale et le Conseil d’État sont dissous, le suffrage universel rétabli et un plébiscite annoncés.
Les 21 et 22 décembre, le pays apporte son soutien au Prince-Président. Le 14 janvier 1852, il promulgue une nouvelle constitution, lui donnant l’ensemble des pouvoirs pour une durée de dix ans. Huit jours après par décret du 22 janvier, il institue la Médaille Militaire. C’est dire l’importance de cette décoration ! D’autant plus que, s’il replace l’effigie de Napoléon 1er sur l’insigne de la Légion d’Honneur (décret du 16 mars), c’est sa propre effigie qu’il n’hésite pas à mettre, avec son prénom ” Louis-Napoléon ” sur l’avers de la Médaille qu’il a créée et décrite dans un décret du 29 février. Elle est de plus surmontée de l’aigle impériale, tenant deux éclairs de foudre dans ses serres.
Le message est clair : l’annonce du retour de l’Empire des BONAPARTE est évident.
Le modèle de l’insigne est sans doute l’œuvre du graveur général des Monnaies ” BARRE “. Auteur également des médailles de Crimée, d’Italie et du Mexique.
Ce décret du 22 janvier outre la création de la Médaille Militaire, réglait aussi l’emploi par l’État des biens confisqués à la famille de Louis-Philippe. Le Prince-Président y glissa deux articles (le 11 et le 12) créant la Médaille.Le texte du 29 février lui était entièrement consacré.
Décoration de souverain et non de Président, la Médaille Militaire reçoit de plus un ruban jaune bordé de vert qui rappelle celui de l’Ordre de la Couronne de Fer que Napoléon 1er avait établi en 1805 pour son royaume d’Italie. Il n’y a aucun rapport entre ces deux décorations si différentes. Mais il est à remarquer, que l’Empereur portait l’insigne de son Ordre italien à côté de sa Légion d’Honneur ; son neveu fera de même pour sa Médaille Militaire.
Pour l’histoire : une note retrouvée dans les Archives de la Guerre (accompagnée de l’original du décret du 19 février 1852) explique le choix du ruban. Le ruban de la Couronne de Fer était orange. Le Prince a retenu le jaune pour la Médaille Militaire, car avec le temps, l’orange vire au jaune comme on peut le constater au Musée de la Légion d’Honneur.
Toutefois, cette décoration répond à un réel besoin. En France, il n’y avait jamais eu de décoration réservée à la troupe et aux sous-officiers. Sous l’Ancien Régime, les actes de courage et bravoure étaient récompensés par l’avancement et des avantages financiers sous formes de pensions diverses. Les médaillons de vétérans récompensant l’ancienneté.
Sous le Consulat, il y eut les Armes d’Honneurs puis la Légion d’Honneur, mais qui étaient décernées aussi aux officiers et pour l’Ordre aussi aux civils. Nombreuses furent les actions héroïques sans récompense sous l’Empire. Phénomène qui s’accrut avec la conquête de l’Algérie sous le règne de Louis-Philippe.
Avant de créer la Médaille, le Prince-Président distribua des témoignages officiels de satisfaction signés de sa main et comportant un diplôme richement décoré destiné à être encadré. En janvier 1852, il arrêta les quatre traits caractéristiques de ” cette marque individuelle ” qu’il allait créer :
- elle prendrait l’aspect d’une médaille
- elle serait la Médaille Militaire pour couronner la haute vertu militaire
- elle serait attribuée aux soldats, matelots, sous-officiers et assimilés
- elle comporterait d’une part une rente et serait d’autre part la récompense suprême des généraux
Il fut soutenu dans son projet par son demi-frère, le duc de Morny, et le général de SAINT-ARNAUD, ministre de la Guerre. Le 21 mars 1852 eut lieu dans la cour des Tuileries, la première remise de Médailles Militaires à des sous-officiers et soldats cités à l’ordre ou blessés.
Le 10 mai 1852, la seconde remise eut lieu sur le Champ de Mars, devant la foule parisienne. Aux 1 700 soldats et sous-officiers décorés s’ajoutèrent deux généraux, anciens de la Grande Armée, les comtes Reille et Vaillant, qui venaient d’être élevés à la dignité de Maréchal de France.
Sous le Second Empire, 43 Médailles Militaires furent remises à des généraux et amiraux. Chiffre exceptionnellement élevé. La IIIe République conserva ce système qui valorisait le corps entier des Médaillés Militaires. Le prestige de cette décoration fut encore renforcé par sa remise aux Maréchaux de la Première Guerre Mondiale.
Le général FOCH la reçut le 21 décembre 1916. Les généraux JOFFRE et GALLIÉNI, le furent également. Le symbole de cette décoration était très fort : Le général LYAUTEY fut décoré au Maroc par un sous-officier, l’adjudant CAVIGLIOLI lui-même médaillé. On estime à un million le nombre de Médailles Militaires attribuées depuis sa création en 1852 à des soldats, marins, gradés et sous-officiers ou officiers de maistrance. L’administration de la Médaille Militaire a été confiée dès l’origine (article 7 du décret du 29 février 1852) à la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur.
Cette décoration est gérée par le Grand Chancelier. Elle est actuellement régie par le Code de la Légion d’Honneur et de la Médaille Militaire, promulguée par le général DE GAULLE en 1962.
Les bénéficiaires et les conditions d’obtention
La Médaille Militaire récompense les militaires et assimilés non officiers, conformément à l’article R.136 du Code de la Légion d’Honneur et de la Médaille Militaire instituée par le décret du 28 novembre 1962. Elle peut aussi être concédée (décret pris en Conseil des ministres) aux Maréchaux de France et aux officiers généraux, grand’croix de la Légion d’Honneur, qui en temps de guerre ont exercé un commandement en chef devant l’ennemi ou ont rendu des services exceptionnels à la Défense Nationale (ce dernier cas date d’un décret présidentiel du 5 mai 1950).
Elle peut être attribuée :
- à ceux qui comptent huit années de services militaires
- à ceux qui ont été cités à l’ordre de l’armée quelle que soit leur ancienneté de service
- à ceux qui ont reçu une ou plusieurs blessures en combattant devant l’ennemi ou en service commandé
- à ceux qui se sont signalés par un acte de courage ou de dévouement méritant récompense
Par ailleurs, le ministre de la Défense est autorisé à décerner la Médaille Militaire, soit directement, soit par voie de délégation, dans un délai d’un mois, aux militaires et assimilés, non officiers, tués ou blessés dans l’accomplissement de leur devoir.
Les propositions des militaires d’active sont transmises par la voie hiérarchique. En règle générale, les personnels non officier ne peuvent concourir pour la Légion d’Honneur qu’après avoir reçu la Médaille Militaire. Les personnels qui n’appartiennent pas à l’armée active doivent faire acte de candidature auprès de l’autorité qui détient leurs pièces matricules à l’exception des mutilés de guerre titulaires d’une pension d’invalidité au moins égale à 65 % qui doivent adresser directement une demande au Cabinet du ministre de la Défense, Bureau des Décorations.
Le Conseil de l’Ordre de la Légion d’Honneur examine, à la Grande Chancellerie, les candidatures à la Médaille Militaire. La Médaille Militaire est accompagnée d’un traitement (devenu symbolique comme celui de la Légion d’Honneur) dans le cas des personnes décorées pour faits de guerre et dans celui des militaires du service actif.
Les étrangers qui servent ou ont servi dans l’armée française concourent pour la Médaille Militaire avec ou sans traitement : les premiers sur proposition du ministre de la Défense, les seconds sur proposition du Grand Chancelier de la Légion d’Honneur.
La distinction
La médaille est une couronne de laurier d’argent qui entoure un médaillon d’or où figure l’effigie de la République, entourée d’un cercle d’émail bleu où sont inscrits les mots : ” République Française “. Au revers, la médaille porte au centre du médaillon d’or, entouré d’un cercle bleu, la devise : ” Valeur et Discipline “. Les feuilles et boutons de laurier sont liés de deux rubans entrecroisés en haut et en bas. La médaille est suspendue à une bélière d’argent en forme de trophée d’armes (motifs : une cuirasse posée sur une ancre de marine, deux tubes de canons entrecroisés, une hache, un sabre…).
L’insigne est suspendu à un ruban jaune bordé de vert des deux côtés. La Médaille Militaire se porte après la Légion d’Honneur (ou éventuellement l’Ordre de la Libération) et avant l’Ordre National du Mérite.
À la chute du Second Empire, l’aigle qui surmontait la décoration fit place à un trophée d’armes et l’effigie de Napoléon remplacée par celle de la République (décret du 8 novembre 1870). La date de 1870 fut inscrite sur l’exergue (et remplacée par une devise par décret du 8 novembre 1951).
La fouragère
Il s’agit d’un cordon tressé à la couleur (jaune et verte) de la Médaille Militaire. Le port de cette fourragère n’est pas le privilège des régiments et unités décorées de la Médaille Militaire. Il est réservé aux régiments et unités formant corps qui ont été cités 4 ou 5 fois à l’ordre de l’Armée. Le port de deux fourragères de la Légion d’Honneur et de la Médaille Militaire est réservée aux régiments et unité qui ont été cités 12 à 14 fois à l’ordre de l’Armée.
Le cérémonial de réception
La cérémonie se déroule habituellement lors d’une prise d’armes. Lorsque ce n’est pas le cas, la remise de la Médaille Militaire, qu’elle soit effectuée dans un cadre public ou privé, doit avoir la solennité requise. Lors d’une prise d’armes, le commandant des troupes fait sortir du rang s’il y lieu le drapeau sans sa garde et le fait placer devant les troupes.
Les médaillés militaires ou les autorités désignées pour remettre les insignes se groupent à cinq pas derrière le drapeau. Les récipiendaires se rangent à dix pas devant le drapeau et lui faisant face. S’il y a des membres et des récipiendaires de l’Ordre de la Légion d’Honneur, les médaillés militaires et les récipiendaires de la Médaille Militaire se placent à leur gauche. La remise de la Médaille Militaire se fait après celle de la Légion d’Honneur, si elle se fait au cours d’une cérémonie commune.
Le commandant des troupes fait mettre l’arme sur l’épaule et ouvrir le ban. La personne procédant à la remise de la décoration se place en face du récipiendaire et l’ayant appelé par son grade et son nom, il lui adresse les paroles suivantes : ” Au nom du Président de la République, nous vous conférons la Médaille Militaire “. Elle lui fixe l’insigne à gauche sur la poitrine. Le commandant des troupes fait fermer le ban. Le drapeau rejoint sa garde.Puis les nouveaux médaillés militaires assistent au défilé des troupes.
L’organisation
Le Grand Chancelier de la Légion d’Honneur gère la Médaille Militaire. De même, l’administration de la Légion d’Honneur s’étend à la Médaille Militaire. Les services administratifs communs sont installés au Palais de la Grande Chancellerie, 1, rue de Solferino à Paris dans le 7e arrondissement. Le service des propositions et celui de gestion sont communs à la Légion d’Honneur et à la Médaille Militaire, sous la direction du Secrétaire général adjoint de la Grande Chancellerie. Les médaillés militaires sont soumis aux même règles de discipline que les membres de l’Ordre de la Légion d’Honneur. La Société d’Entraides des Médaillés Militaires, joue un grand rôle social, son siège est situé 36, rue de la Bienfaisance à Paris dans le 8e arrondissement. Société mutualiste, elle a été créée en 1904. Régie par la loi du 1er avril 1892, approuvée le 10 mai 1904, elle fut reconnue d’utilité publique le 3 novembre 1931. Elle édite une revue intitulée ” Le Médaillé Militaire “, qui défend le prestige de la décoration, les intérêts et les droits de ses membres.
Les villes, emblèmes et collectivités peuvent également recevoir la Médaille Militaire, mais il faut signaler que cette distinction est très rare.
Notons le fanion de la 3e compagnie du 1er RCP (Régiment de Chasseurs Parachutistes), décoré au Liban le 8 novembre 1983. Cette unité ayant perdu 58 soldats lors d’un attentat à Beyrouth.
De rares personnalités étrangères ont reçu la Médaille Militaire. L’exemple de CHURCHILL décoré par Paul RAMADIER, Président du conseil et médaillé militaire.
Le Palais de Salm ayant brûlé sous la Commune et beaucoup d’archives détruites, les recherches concernant les débuts de cette décoration sont très difficiles. Toutefois, il semble que la première femme médaillée militaire ait été Perrine CROS, cantinière aux chasseurs à pieds de la Garde et blessée à Solferino, décorée en 1859. Déjà originale par le fait qu’elle récompense à la fois la base de la hiérarchie (le personnel non officier) et son sommet (les officiers généraux), la Médaille Militaire se caractérise aussi par le fait que tout en étant la médaille de la bravoure, elle remplace l’ancien médaillon de la Vétérance de l’Ancien Régime. Mais l’ancienneté n’est pas un droit et le nombre minimum de huit années de services n’est qu’une indication pour les propositions à partir desquelles les militaires peuvent concourir.